L’hiver n’est pas la saison idéale pour jouer au golf.
Tout le monde sait ça. Ajouter des conditions de jeu rigoureuses à des règles
qui sont déjà très rigoureuses, ça fait beaucoup dans la rigueur...
Que faire ? Le choix est simple : Prendre un avion chaque
week-end pour la Floride, ou s'adapter. N'oublions pas que la capacité
d'adaptation est une des qualités essentielles du bon joueur de golf. Les
professionnels qui vont et viennent tout au long de l'hiver de l'extrême orient
au Mexique en passant par l'Afrique du sud, l'Australie, Hawaï ou la Californie
sont bien placés pour le savoir.
Et pourtant… Malgré les trois ou quatre épaisseurs de
vêtements qui nous mettent aussi à l’aise
qu’un bébé dans ses couches, malgré les bonnets de laine, les mains
engourdies, les pieds gelés, la technique oubliée, l’occasion est unique !
Trois mois durant lesquels on peut se lâcher sans le moindre scrupule, et jouer enfin
uniquement pour le plaisir.
Plus la peine de compter les putts, puisque les greens ont
disparu. Plus de problèmes de distances : On part d’où bon nous semble. Le
Mulligan est recommandé, pour se réchauffer, évidemment. On place toujours la
balle, puisque le lie est toujours mauvais, et on droppe sans pénalité de
partout, puisque les kicks sont toujours injustes. Les balles ne se perdent
plus dans les obstacles d’eau : Elles roulent magnifiquement sur la
surface gelée, jusqu'à l’autre rive. On peut faire le parcours en zigzag, à
l’inspiration, puisqu’il n’y a personne, ni derrière, ni devant.
Enfin, presque personne.
Seuls restent les vrais, les purs, les mordus. Ceux qui
vous font un petit signe amical, avec leurs moufles, au détour d’un chemin. Un
signe de reconnaissance.
Est-ce encore du golf ? Allez donc demander aux suédois,
aux Ecossais ou aux Canadiens : Ils vous en parleront mieux que moi.
Suivons leurs traces dans la neige fondue ! Profitons-en pour redécouvrir
ces formules conviviales et trop rares que sont le Chapman, le Greensome, le
Foursome, le patsome, la course au drapeau ou même à la ficelle, le contre-par
ou contre-bogey. Jouons avec trois clubs seulement, ou deux, ou même un seul.
C’est beaucoup plus amusant qu’on ne l’imagine. Montrons nous novateurs dans le
comptage des points. Marquons les cartes de score en anciens Francs, divisons
par 113, chargeons un peu le SSJ, puis faisons la conversion en Euros, avec la
virgule, et les arrondis, comme pour le calcul de l’index.
A la fin du parcours, plus la peine d’attendre vingt-deux
heures pour admirer le coucher de soleil sur les fairways. A dix-sept heures,
le rideau tombe. On retrouve la chaleur bienfaisante du club house, les
boissons chaudes, et les conversations rassurantes. On peut tout expliquer.
Même le pire.
On peut aussi terminer agréablement la soirée, par exemple
en lisant le superbe recueil de textes John Updike « Rêves de golf »,
avec en particulier, à la fin du livre, un court récit intitulé « Le golf
en décembre » Un plaisir rare.
Alors, vous voyez bien ! L’hiver, au golf, ça peut
être aussi la saison des plaisirs.
PATRICK MICHELETTI
e-mail :
pamicheletti@aol.com