Le sourire de Thomas
Les professeurs de golf vous conseilleront souvent de
garder le sourire en toutes circonstances sur le parcours, et particulièrement
durant les compétitions, lorsque les coups deviennent délicats, ou que le
mauvais sort s’acharne sur votre jeu.
Penser à sourire présente une multitude d’avantages, et
sauf erreur de ma part, aucun inconvénient. Cela ne nuit en rien à la
concentration, bien au contraire. Cela permet aussi de relativiser l’importance
de la chose, de faire diminuer la pression, d’adopter une attitude mentale
positive, d’économiser son énergie, en ne la dépensant pas dans des accès de
colère stériles, cela favorise un bon relâchement musculaire, et en prime, cela
vous rend plus agréable pour vous partenaires de jeu et vous attire les faveurs
du public si vous êtes un joueur professionnel.
Je pensais à ce « truc du sourire », en suivant
Thomas Levet sur ses deux premiers tours du British Open, à Muirfield. Son
attitude le vendredi fut particulièrement significative de ce point de vue.
Thomas était manifestement heureux d’être là, ayant tout à
gagner face aux meilleurs joueurs du monde, dans un tournoi prestigieux, sur un
parcours de légende.
Il souriait au practice, il souriait au putting green, il
souriait en signant des autographes aux enfants, il souriait aux quelques
supporters Français, il souriait sous la pluie, et il souriait encore lorsqu’il
frappa un drive superbe ce deuxième jour, au départ du très intimidant trou
numéro un.
Il entama le tour par deux birdies consécutifs, et garda
le sourire jusqu’au 18, pour conclure avec un 66 admirable, sans une seule
faute, qui le plaça de manière idéale sur les rails pour la suite du tournoi.
Son sourire et sa décontraction contrastaient de manière
saisissante avec le masque glacial et crispé de ses partenaires du jour, Niklas
Fasth et Franck Lickliter.
Le dimanche soir, à la fin du play-off, il ne manquait
qu’un seul petit point pour un bonheur total, mais Thomas souriait encore en
félicitant chaleureusement Ernie Els, et en soulevant le géant Sud-Africain
dans ses bras sur le green du 18. Prudence tout de même, Thomas, un certain
Costantino Rocca s’est sérieusement blessé au dos en soulevant ainsi le bon
quintal de Colin Montgomerie après une victoire en Ryder Cup...
La prochaine fois que vous serez en difficulté sur un
parcours, souvenez vous de cette leçon donnée par Thomas Levet.
Le « Truc du sourire » fonctionne, et c’est
aussi un élément essentiel de la convivialité golfique. En plus, garder le
sourire sur un parcours ne nécessite pas un entraînement très intensif. Il faut
juste faire un petit effort au départ, s’y raccrocher dans les passages
difficiles, et au fil du temps, cela peut même devenir tout à fait naturel...
Comme pour Jean van de Velde il y a trois ans, une
nouvelle carrière commence pour Thomas Levet, plus intense, plus gratifiante,
mais aussi plus difficile. Avec son moral d’acier et la confiance que va lui
apporter cette deuxième place du British, s’il garde le sourire, il est
probable que ce sera lui qui brandira un jour à bout de bras une de ces
fameuses coupes du Grand Chelem.
Ca finira bien par sourire...
PATRICK MICHELETTI